La Canne du Roi est un film fantastique qui s’inspire d’histoires, de légendes et de héros du
folklore béninois pour enrichir son récit. En explorant des terres locales, on découvre des objets
et des symboles culturels qui nous familiarisent avec l’univers du pays du Roi Béhanzin. La
musique, les costumes, la danse dahoméenne, tout s’y mêle dans cette fabuleuse encyclopédie
visuelle. Une telle œuvre n’a donc pas seulement vocation à divertir le spectateur. Elle l’informe
sur le passé, elle lui enseigne l’histoire et ses figures emblématiques, car ne pas connaître son
histoire, c’est perdre ses racines. Perdre ses racines, c’est oublier qui on est. Le cinéma est un
média puissant en ce sens qu’il peut nous aider à « retrouver la voie ».
Comme avec une “canne», il nous guide.
1- Le parallélisme entre pouvoir et responsabilité
La Récade sacrée, élément central de l’intrigue, apparaît autant comme un artefact d’unification
qu’un objet de division, selon les mains qui la possèdent. C’est une arme puissante. Zowadan,
l’antagoniste du film, a assassiné son frère, le Roi Requin, dans le but d’accéder au trône et de
régner avec. Sa convoitise l’a également mené à fomenter un coup d’état contre son neveu,
souverain actuel du royaume, sous prétexte que ce dernier manque de sagesse pour diriger.
D’un autre côté, Ola, le protagoniste, est un simple ouvrier qui incarne le courage et l'altruisme
des grands héros. En protégeant la Récade sacrée, il risque sa vie pour sauver celle des autres.
En somme, le « méchant » cherche toujours plus de pouvoir là où le héros prend ses
responsabilités.
2- Un film d’époque ‘’d’actualité’’
La Canne du Roi aborde aussi des sujets importants tels que la restitution du patrimoine
culturel, ou encore le féminisme. Si le film présente des femmes en position de leaders,
notamment à travers le personnage de la princesse Tassi, cela contribue à briser les
stéréotypes de genre et à montrer des figures féminines influentes et autonomes. Selon
Zowadan, « Le champ de bataille n’est pas un lieu pour une dame. » Mais, ironiquement, à
l’issue de la bataille finale, la princesse lui porte elle-même le coup de grâce qui met fin à son
oppression. Entre les mains de cette souveraine, la Récade sacrée devient plus qu’un bâton qui
inspire la crainte et le respect, c’est un symbole de paix.
3- Une œuvre cinématographique engagée
Le film nous montre ainsi que le retour des objets d'art, qui sont des trésors civilisationnels, est
crucial pour réparer les injustices du passé colonial, et rétablir l'intégrité culturelle des nations
spoliées. Au reste, tout le bijou de ce film réside, à mon avis, dans le genre narratif du conte traditionnel
qu’il emploie ; des péripéties et une belle leçon de morale à la fin pour éduquer, « comme au
bon vieux temps ».
La Canne du Roi entre dans les archives de ces œuvres qui enrichissent le cinéma béninois,
tout en honorant le cinéma africain. L’utilisation des effets spéciaux lui apporte une touche
fraîche de modernité, preuve qu’il est possible, avec des moyens financiers et de la volonté, de
concurrencer les productions étrangères à gros budget en termes de contenus audiovisuels forts
et de qualité.
De Dakar - Jean Jacques Pascal Assoumou